Selon les projections économiques de l’automne 2016 réalisées par la BNB, l’emploi en Belgique a augmenté de 116.000 unités sur la période 2014 – 2016. Le gouvernement fédéral s’est empressé d’y voir une illustration du succès de sa politique. Ce que notamment l’Institut pour un développement durable a «mis en perspective».
Se faire une opinion quant au lien entre l’action de tel gouvernement et nos performances d’emploi est un exercice critiquable si l’évolution observée n’est pas comparée à la construction d’une situation de référence de qualité. Celle-ci doit mesurer ce qu’il serait advenu à l’emploi chez nous en l’absence de l’action du gouvernement concerné. La construction de cette situation de référence est indispensable. Elle est aussi un défi, souvent mal relevé.
Supposons que les statistiques d’emploi soient établies de manière idéale. Il ne suffit pas de regarder comment l’emploi a évolué sur la période où tel gouvernement est en exercice. Parce que
Une première alternative à l’approche naïve indiquée à l’instant consisterait à regarder l’évolution de l’emploi en tenant compte du taux de croissance actuel de l’économie belge. Si, à une époque antérieure, la croissance économique était semblable mais l’évolution de l’emploi moins bonne que sous le gouvernement actuel, on aurait un signe d’une amélioration par rapport au passé. C’est aussi insatisfaisant, car
Une manière de tenir compte de l’environnement international consisterait à comparer l’évolution de l’emploi en Belgique à celui de petites économies ouvertes et géographiquement proches. L’hypothèse sous-jacente serait que si notre pays a de moins bonnes (ou de meilleures) performances d’emploi, c’est en raison de l’intervention publique chez nous. Cette comparaison est difficile à fonder et donc fragile car
Que peut-on alors faire de mieux ? Une piste consiste à faire confiance à un modèle macroéconomique de la Belgique et de ses régions. Il est possible de revenir en arrière et de simuler ce modèle, sous l’environnement international observé, à partir de l’entrée en vigueur du gouvernement considéré. Une simulation doit être faite sous deux cas de figure : d’abord, en n’incluant aucune des mesures introduites par le gouvernement considéré mais bien celles prises par les autres niveaux de décision (ce faisant, on construit une situation de référence); ensuite, en introduisant les mesures prises par le gouvernement considéré. La comparaison de l’évolution de l’emploi dans ces deux scénarios produit une information sur les effets de l’action du gouvernement considéré. Elle sera évidemment tributaire du modèle macroéconomique retenu et de sa capacité à représenter les mesures prises par les différents niveaux de pouvoir en Belgique. Je ne pense pas que cet instrument macroéconomique régionalisé existe déjà avec le niveau de finesse requis.
Est-on donc condamné à l’ignorance ? Non, si l’on accepte de passer de l’impact macroéconomique de tel gouvernement à l’impact d’une politique ou d’une réforme précise. En effet, l’analyse de l’impact d’un dispositif public précis peut dans certaines circonstances être mesuré en construisant avec rigueur ce qui serait advenu en l’absence de ce dispositif. Mais, il faut s’en donner les moyens et le temps (ce qui est rarement fait). Sans quoi, on attribuera à de vagues corrélations un pouvoir explicatif (une relation de cause à effet) qu’elles n’ont pas et n’auront jamais.